Les enjeux de l'intégration des bénéficiaires d'une protection internationale dans l'Union européenne
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Recevez chaque trimestre le nouveau numéro de Vues d’Europe dans votre boîte mail S'abonnerLa Commission européenne dévoile ses propositions pour réformer la politique migratoire européenne
Outre la création d’un mécanisme de solidarité obligatoire entre les États membres, les mesures présentées le 23 septembre par la Commission prévoient de renforcer les contrôles aux frontières extérieures de l’Union et d’accélérer les retours vers les pays tiers.
Avec son nouveau « Pacte européen pour la migration et l’asile », la Commission espère enfin aboutir à un compromis sur ce sujet entre les 27, toute tentative de réforme ayant échoué depuis 2015.
Pour ce faire, la Commission propose de créer un système de « filtrage » à l’arrivée dans l’Union, basé sur un contrôle d’identité, médical et de sécurité approfondi des personnes entrées irrégulièrement en Europe ou qui ont été arrêtées dans un État membre sans être passé par cette procédure au préalable. Les personnes seront ensuite « orientées vers la procédure appropriée », à savoir, en fonction de leur situation : un retour immédiat vers leur pays d’origine, une procédure d’asile à la frontière (notamment pour les personnes peu susceptibles d’obtenir une protection internationale selon les taux de protection moyens dans l’UE) ou une procédure normale dans un État membre.
Le nouveau Plan prévoit également de mettre fin au règlement Dublin devenu, selon les mots de la présidente de la Commission Ursula von der Leyen, le représentant de « l’ancien système » qui « ne fonctionne plus ». En effet, les États membres choisissaient presque systématiquement le critère du pays de première entrée, faisant ainsi reposer la responsabilité de l’accueil sur les pays situés aux frontières extérieures de l’UE. La réforme s’annonce toutefois timide : si, selon le nouveau plan, un demandeur d’asile pourra être transféré vers un autre pays dans lequel il aurait des frères ou sœurs ou où il aurait préalablement travaillé, étudié ou obtenu un visa, la règle qui fait des pays de première arrivée les responsables de l’examen des demandes sera maintenue.
Néanmoins, afin d’aider les pays « en première ligne » tels que l’Italie, la Grèce ou l’Espagne, les autres États membres pourront volontairement accueillir sur leur territoire des demandeurs d’asile via un mécanisme de relocalisation, organiser l’expulsion vers leur pays d’origine des personnes dont la demande de protection internationale a été rejetée ou qui n’ont finalement pas sollicité l’asile (« retour parrainé ») ou encore d’apporter une « aide opérationnelle ». En cas de situation de crise, de pression migratoire ou de débarquement de personnes secourues en mer, un mécanisme de solidarité spécifique et obligatoire sera cette fois mis en œuvre, sur initiative de la Commission ou sur demande d’un État membre. Dans ce cadre, le nombre de personnes à accueillir ou à expulser sera fixé en fonction du PIB et de la population de chaque pays de l’Union. À travers ces mesures transparait la priorité de la Commission de rendre les retours plus effectifs, en renforçant également la coopération des États membres avec les pays tiers, d’origine ou de transit.
Avant d’entrer en vigueur, le Pacte fera l’objet de négociations entre le Conseil de l’UE et le Parlement européen et il devra par la suite être approuvé par l’ensemble des parlements nationaux des États membres. Les négociations s’annoncent difficiles : si l’Allemagne et la France ont annoncé soutenir ces propositions, les réactions des gouvernements espagnol, grec ou encore tchèque ont été plus contrastées. Les pays de première entrée, dont l’Italie et la Grèce, ont également exprimé leur scepticisme sur ce projet de réforme. L’opposition la plus forte est venue du gouvernement hongrois : lors de la rencontre qui a réuni le 24 septembre à Bruxelles la Hongrie, la Pologne, la République tchèque et la présidente de la Commission, Viktor Orbàn a estimé que « l’approche générale n’a pas changé car ils [la Commission] veulent continuer à gérer la migration et non pas arrêter les migrants ». Le groupe dit « de Višegrad » ainsi que l’Autriche, déjà hostiles au mécanisme de relocalisation dans l’UE, campent ainsi sur leurs positions.
Ces dissensions exprimées au lendemain de la publication du Pacte pourraient constituer un frein à ce projet de réforme lors des discussions à venir au Parlement européen et au Conseil de l’UE. D’ailleurs, la majorité des groupes parlementaires européens a pointé du doigt l’insuffisance du nouveau Pacte et a exprimé des divergences de vues sur ses propositions.
Ce texte reprend deux articles publiés dans la « Veille Europe » du 16 au 30 septembre, accessibles ici et ici.